Ces beaux jours d’avril, j’ai récolté du pollen, ou plus exactement, j’ai volé du pollen que mes abeilles récoltent sur les floraisons printanières, un vrai délice !
Les abeilles sont des organismes issus d’un œuf de petite taille qui évolue en une vingtaine de jours en insecte « parfait ». Pour ce faire, comme tous les animaux, elles ont besoin d’énergie fournie par le nectar (= des glucides) et de protéines pour construire leurs structures.
Chez Apis mellifera, l’unique source de protéines est le pollen.
Dès le début du printemps, la reine se remet à pondre, et les ouvrières apportent aux larves nées des œufs de la nourriture : d’abord une sécrétion issue de glandes situées dans leur tête, puis une bouillie faite de salive, de nectar +/- concentré et de pollen. Elles recrutent dans la colonie des abeilles particulièrement habiles à ces différents exercices.

Comment l’apiculteur-voleur dérobe t’il le pollen aux abeilles ? Il place à l’entrée de la ruche un dispositif diabolique qui oblige les abeilles à passer par une plaque percée de trous au calibre calculé au 1/10 de mm près. Pour franchir l’obstacle, l’insecte doit se contorsionner et les « pelotes » de pollen accrochées à ses pattes postérieures se détachent et tombent dans un bac.

Au jour 1, on place le dispositif à l’entrée de la ruche sans la plaque percée de trous pour les habituer à retrouver l’entrée de leur demeure.
Au jour 2, le matin, on place la grille percée.  Le soir, après le retour de la dernière butineuse, on peut récolter le pollen. Chez moi, j’ai rempli un petit pot.
Au jour 3, on enlève la grille percée pour que les abeilles puissent avoir assez de pollen pour leurs larves.
Au jour 4, on remet la grille. Le soir on récolte et miracle, le volume récolté est double, soit 2 petits pots.

On admet que les abeilles à l’issue du jour 2 constatent une récolte insuffisante et puisent dans la « réserve de recrutement » de nouvelles butineuses - récolteuses de pollen, des vrais spécialistes et des polyvalentes.
Les récolteuses pro sont programmées pour faire de grosses pelotes de pollen qui tombent dans le bac de récolte : bénéfice pour la colonie zéro.
Les nouvelles recrutées sont moins spécialisées et rapportent de plus petites pelotes et peuvent ainsi passer l’obstacle avec leurs petites pelotes. Elles jouent donc un rôle essentiel dans ces circonstances exceptionnelles.
Dans la ruche, tout le monde ne travaille pas en même temps, il y a toujours un pourcentage non négligeable de polyvalentes qui peuvent à la demande se transformer en porteuse d’eau, butineuse de pollen, de nectar, redevenir nourrice, garde armée  à l’entrée de la ruche, … ou même se mettre à pondre pour pallier une reine défaillante.
Y a-t-il une Sophie Wilmès dans la colonie ou une cellule de crise pour modifier les comportements ?
Non, la comparaison de la société abeille avec la nôtre ne va pas jusque-là !
Les théories les plus crédibles parlent d’émission par les abeilles de phéromones spécifiques liées aux différentes activités ; il y aurait un subtil équilibre entre ces différentes « odeurs » à maintenir….
Peut-être devrions-nous cesser l’usage des déodorants et autres parfums… pour faire l’économie de décideurs !



Bernard Delforge