A mes débuts en apiculture, nous posions souvent les premières hausses aux premiers jours de mai.
Cinquante ans plus tard, à la même date, on prépare la miellerie pour la récolte du miel de printemps…

Ne dit-on pas que les années se suivent, mais ne se ressemblent pas ? C’est bien la vérité lorsqu’on suit les dates de floraisons comme je le fais depuis 40 ans. Pour ne pas remonter aussi loin, la figure ci-dessus donne trois informations : les dates moyennes de floraisons pour la dernière décennie, les dates de floraisons en 2019 et en 2020. La figure concerne les espèces printanières, celles de la période pré vernale et celles de la miellée de printemps.

Les courbes ne se superposent pas, ce qui signifie que pour les trois périodes considérées, les floraisons n’ont pas lieu au même moment. En réalité, les floraisons de 2020 sont généralement plus précoces que celles de 2019, elles-mêmes bien plus précoces que les floraisons moyennes de la décennie qui s’achève.
Cette saison 2020 a commencé par un hiver doux avec des températures bien au-dessus des normales saisonnières. Cette douceur de l’hiver a pour effet d’accélérer certaines floraisons, surtout printanières, mais toutes les espèces ne réagissent pas de cette manière. L’absence de froid hivernal peut, dans certains cas, retarder une floraison, même si cela paraît contre-intuitif.
Les dates de floraison de 2020 sont parmi les plus précoces enregistrées depuis le début de mes observations. Cette précocité se
remarque fortement dans la première quinzaine de mars avec des espèces comme le peuplier ou la petite pervenche qui a battu ses records de précocité cette année. La suite du mois de mars et le tout début d’avril sont normaux sur le plan des températures, ce qui a ralenti un peu les floraisons, comme celles du groseillier à maquereau, de l’érable plane ou du prunellier.
Le mois d’avril à partir du 5 est très chaud, bien au-dessus de la normale. Le prunellier, le lierre terrestre, la cardamine fleurissent simultanément, accompagnés du merisier et du pissenlit, annonciateurs de la miellée de printemps. Cette période de pré-miellée passe donc très vite avec toutes les espèces en fleurs en même temps. Et comme les températures restent élevées, l’accélération se poursuit. Toutes les espèces de la miellée de printemps, du pissenlit à l’aubépine (pas d’acacia chez nous) apparaissent en l’espace d’une dizaine de jours !
Avec un ensoleillement important en avril, les abeilles ont profité de l’abondance des floraisons. Un petit bémol cependant à propos de la dominance des vents d’est ou nord-est qui ont réduit la quantité de nectar dans les fleurs par leur effet desséchant ! Le printemps 2020 est assurément bien meilleur que le précédent, mais aussi et surtout, encore plus précoce !

Hubert Guerriat